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Avec le Covid devenir bénévole n’a jamais eu autant de sens

Dernière mise à jour : 26 janv. 2021

Pour se rendre utile en période de crise sanitaire, les jeunes redoublent d’effort pour venir en aide aux personnes dans le besoin.

Des bénévoles des Restos du cœur distribuent de la nourriture dans un centre à Paris en octobre 2020 (crédits CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)


Devenir bénévole dans une association caritative, Romane Lhériau y songeait depuis longtemps. Le premier confinement s’est présenté comme la meilleure porte d’entrée. Une occasion inattendue pour la jeune femme qui a décidé de s’engager à plein temps. « Avec la crise, j’ai perdu mon boulot dans la restauration, raconte-t-elle. Les Restos du cœur de Châtellerault (86) recherchaient de nouveaux bénévoles en urgence, c’était le moment d’y aller à 100%. » Elle, qui adolescente, avait coutume de passer devant le local de l’association, le découvre de l’intérieur.


Trois jours par semaine, Romane Lhériau distribue de la nourriture aux bénéficiaires, de plus en plus nombreux depuis le début de la pandémie, et prépare en parallèle ses concours pour décrocher une école de journalisme. « C’est la première fois que je me sentais utile à ce point-là, confie-t-elle. Maintenant j’en ai besoin. » Aujourd’hui étudiante en première année de journalisme à Tours, elle doit faire une pause avec les Restos du cœur, mais elle poursuit son engagement associatif. « Je viens en aide aux mineurs isolés, je suis hébergeuse d’urgence pour Utopia57. » De temps en temps, un jeune migrant s’installe dans son salon l’espace de quelques jours.


« C’est vraiment un moment où l'on se rend compte qu’on a besoin des autres. »

Depuis un an, Marie Sumantri multiplie elle aussi les actions solidaires. Installée aujourd’hui à Bruxelles, cette Montréalaise de cœur est sensibilisée au bénévolat depuis quelques années. Mais sa volonté d’aider les autres s’est renforcée depuis l’apparition du Covid. « C’est vraiment un moment où l'on se rend compte qu’on a besoin des autres. » L’étudiante en communication est activement mobilisée pour différentes structures, notamment celles sensibles aux questions des migrations. « J’essaie d’aider au maximum. J’ai beaucoup réfléchi aux différentes alternatives pour être solidaire. »


Pallier « les déficiences de l’Etat »


Ce dévouement envers les autres est comme inné pour la jeune femme. Pourtant déjà active sur plusieurs fronts, Marie Sumantri veut aller plus loin dans son engagement. « Si j’avais eu du temps pendant les confinements, je me serais aussi inscrite dans des structures pour les sans-abris ou pour aider le monde de la culture par exemple. » Cette volonté, elle la doit à son tempérament de battante, mais vient aussi de ses proches, qui l’inspirent. « Ma cousine est comédienne, elle a lancé un projet de cantine solidaire pour les artistes qui ne travaillent plus depuis le début de la crise sanitaire. »


En temps normal, ce sont les retraités qui sont les plus impliqués dans le milieu associatif. A elles seules, les personnes de plus de 65 ans assurent 35 % du volume de l’action sociale et caritative, selon l’enquête de Lionel Prouteau sur le bénévolat (2017). Jugés vulnérables depuis le début de la pandémie, certains d’entre eux ont été contraints de se retirer, rajeunissant l’âge des bénévoles. Romane Lhériau a 23 ans, Marie Sumantri en a 24. À l’image de plusieurs vingtenaires, les deux étudiantes confirment un phénomène : les jeunes s’investissent dans de nouveaux secteurs de solidarité, comme le démontre une enquête de l’Observatoire sociologique du changement, centre de recherche de SciencesPo. « C’est l'une des rares choses positives de la Covid-19 », souligne Isabelle Persoz, présidente de Tous Bénévoles, dans une interview accordée à l’ONU Info. Elle observe un regain d’engagement chez les jeunes. En 2019, la plateforme, qui met en relation des volontaires et des associations, comptait 25 000 nouveaux bénévoles. Un chiffre qui, pour l’année 2020, a presque doublé.

Aide prêtée lors du premier confinement. Résultats de l’enquête “Faire face au covid 19” de l’Observatoire sociologique du changement.


Selon le maître de conférences en psychologie sociale Christophe Dansac, les bénévoles se retrouvent à pallier « les déficiences de l’Etat ». « Il y a plusieurs domaines que le néolibéralisme a abandonné : l’éducation, la santé, l’insertion sociale. Ce sont ces secteurs qui sont en grande demande de bénévoles”, observe-t-il . Pour lui, plusieurs raisons peuvent expliquer les élans de solidarité observés depuis le début de la crise sanitaire. « L'une des motivations récurrentes en matière de bénévolat est la motivation par les valeurs, explique-t-il. Dans un contexte de crise, les gens ont vu une opportunité de se rendre utile. Ils savaient comment agir sur leur environnement de manière à être efficace et utile. Par ailleurs, pendant le confinement, certains se sont retrouvés libres et ils ont pu vouloir l’occuper. »

Rencontres inattendues


Isolée dans son appartement parisien, Marie Boscher culpabilise d’aimer le confinement. Pour compenser, elle consacre une partie de son temps aux autres, même à distance. « J’ai cousu des masques que j’ai donnés à mes proches, aux gens autour de moi et à des associations. J’ai aussi apporté des vêtements que je ne mettais plus. » Ces petites actions lui permettent de créer du lien. Un nouvelle relation qui se forme parfois avec une tête familière qu’elle n’avait jamais pris le temps de saluer de l’autre côté du palier. En France, 1 personne sur 7 a bénéficié de l’aide de son voisin et 7 personnes sur 10 affirment avoir rendu service au moins une fois au cours du premier confinement.


Les rencontres, c’est ce que Romane Lhériau retire de son engagement. « J’ai rencontré des personnes extraordinaires. Des petites dames sont devenues mes troisièmes ou mes quatrièmes grand-mères. D’autres bénévoles venus eux aussi en renfort sont maintenant mes amis ». Ceux qui volent au secours des personnes dans le besoin ont eux aussi besoin de se serrer les coudes. « On a besoin de solidarité. C’est à travers ça qu’on sortira de cette crise », conclut Marie Sumantri.

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