top of page

À Calais, une association détourne Amazon pour venir en aide aux migrants

Pour gagner en visibilité et mieux faire connaître les conditions de vie des exilés, l'association “L'Auberge des migrants” a lancé une liste d’envies sur la plateforme Amazon. Elle poste des témoignages d’anciens habitants de la “jungle” de Calais en commentaires des produits.


Pour récolter des dons et aider les personnes en exil, "L'Auberge des migrants" a détourné la plateforme Amazon (Crédits : PHILIPPE HUGUEN / AFP).


« L’idée de départ était de transformer Amazon en réseau social », explique à La Quatorzaine François Guennoc, président de “L’Auberge des migrants”. L’association, qui vient en aide aux personnes en exil, vivant dans des conditions difficiles entre Calais et Grande-Synthe (Hauts-de-France), a décidé d’innover, début janvier, en « détournant » Amazon. Le but : sensibiliser les millions d’utilisateurs de la plateforme d’achat en ligne à la situation des exilés et ainsi susciter des dons, indispensables à la survie de l'association.


« On a mis en place sur notre site internet une “wishlist” ou “liste d’envies” qui permet aux gens de commander pour les migrants, toutes choses indispensables à leur survie près de la frontière : des tentes, des couvertures, des chaussures, des vêtements, etc, explique François Guennoc. Avec d’anciens exilés, on a ensuite eu l’idée d’utiliser les espaces de commentaires pour que ces derniers racontent leur histoire via ces produits. »



Des commentaires d’exilés sous les produits


Des sacs de couchage aux brosses à dent en passant par du riz… Depuis début janvier, des dizaines de commentaires d’anciens migrants étant passés par la “jungle” de Calais (campement aujourd’hui démantelé et qui a rassemblé jusqu’à 10 000 personnes en 2016, ndlr) ont ainsi fleuri sous certains produits essentiels. « Le duvet réchauffe bien, même s’il n’est pas fait pour supporter tout ce qui peut vous arriver dans la jungle de Calais. Les débris au sol déchirent parfois la toile, et il faut aussi se méfier des cendres encore chaudes du feu sur le campement », écrit Fazulrehman Z.


« Le duvet réchauffe bien, même s’il n’est pas fait pour supporter tout ce qui peut vous arriver dans la jungle de Calais ».


Il est également possible d’en savoir un petit peu plus sur l’histoire des auteurs des commentaires en cliquant sur leur profil. On apprend par exemple que Riaz A, originaire du Pakistan, aidait des familles à trouver de la nourriture dans la “jungle” de Calais lorsque lui-même y habitait. Il est aujourd’hui étudiant en master de communication à Paris. Fawad J, est lui détenteur d’un diplôme d'infirmier, mais ne peut exercer en France. Il soignait des gens sur le camp et distribuait des bouillottes « à ceux qui avaient de quoi chauffer de l'eau ».


Riaz A., ancien migrant à Calais, raconte l’histoire de sa brosse à dents en commentaire du produit sur Amazon (Capture d’écran).



Élargir l’équipe de bénévoles


Entre 800 et 1 000 exilés vivent aujourd’hui dans des campements insalubres à Calais et Grande-Synthe, selon l'Auberge des migrants. Leurs conditions de vie « n'ayant fait qu'empirer avec la crise sanitaire, alors que les dons en nature pour les aider sont insuffisants cet hiver », précise l’association dans une vidéo diffusée lundi.


« Depuis juillet dernier la pression des autorités s’est beaucoup accentuée », explique

François Guennoc, dénonçant « une politique gouvernementale, qui consiste à faire pression par tous les moyens sur les exilés pour les décourager de venir à Calais et de rester près de la frontière ». « Il y a des évacuations massives, des expulsions quasi quotidiennes... il y a même eu un arrêté d’interdiction de distribution de nourriture en centre-ville », ajoute-t-il.


Nourriture, vêtements ou encore produits de première nécessité… Malgré les difficultés, la trentaine de bénévoles de l’association œuvre sept jours sur sept pour faciliter tant bien que mal le quotidien des migrants bloqués à la frontière entre la France et le Royaume Uni. Sans oublier qu’entre la crise sanitaire et le Brexit, les règles de circulation internationale sont devenues plus strictes. Résultat, le nombre de bénévoles britanniques, très présents sur place, a diminué. François Guennoc espère ainsi que l’impact de « cette utilisation un peu sauvage d’Amazon » permettra, en plus de récolter des dons, d’élargir un peu plus l’équipe.


bottom of page