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Bibliothèque universitaire : « la bouée de sauvetage » des étudiants

La crise sanitaire n’est pas pas tendre avec les étudiants. Obligés de suivre des cours à distance pour la majorité, ils sont nombreux à chercher des solutions pour conserver un lien avec les études. Pour beaucoup d’entre eux, la bibliothèque universitaire s’impose comme un refuge.


Depuis le début de la crise sanitaire, de nombreux étudiants se réfugient entre les rayons de la Bibliothèque Sainte Geneviève, pour fuir la solitude et conserver un lien avec le milieu universitaire. (Crédits: John Towner)

Un doux soleil d’hiver réchauffe la façade de la Bibliothèque Saint Geneviève, dans le 5e arrondissement de Paris. À quelques minutes de l’ouverture, une file commence à se former sur le trottoir face au Panthéon, composée en majorité d'étudiants. Alice, 21 ans, en fait partie. Étudiant en première année de master d’histoire contemporaine du Maghreb, elle étudie souvent ici. « En soi, je n’ai pas besoin de documentation », confie celle qui « a du mal à [se] mettre au travail » dans son studio du 15e arrondissement, où elle vit seule. Comme beaucoup d’étudiants, se rendre à la bibliothèque est devenu une « habitude de travail » depuis le début de la crise sanitaire, et la fermeture des universités.


« Chez moi, je tourne en rond, je deviens fou »

Portable en main, Zoé tente de flasher le QR code permettant d’accéder à la plateforme de réservation. Quelques minutes de stress. Si elle a 30 minutes de retard, son rendez-vous saute. Dix heures et demie sont passées, et elle craint de ne plus pouvoir rentrer. Accompagnée de Théophile, un de ses camarades de promo, c’est la première fois qu’elle vient. Bien qu’elle arrive à travailler dans sa colocation, en sortir lui permet de « changer d’environnement ». « Ça nous fixe un cadre : quand on vient, on sait qu’on va bosser », renchérit son ami avant de filer étudier sur les longues tables en bois de la bibliothèque. Même constat pour Mohammed, poussé en bibliothèque par le second confinement. Adossé à un lampadaire, l’étudiant en théorie du droit fume une cigarette avant d’entamer la matinée : « Ça permet de programmer la journée, constate le jeune homme. Chez moi, je tourne en rond, je deviens fou ». Il est onze heures quand il se décide à passer la porte.


À l’entrée, il faut montrer patte blanche : carte de bibliothèque et réservation de place. Mais manque de chance, William a oublié sa carte ce matin. En deuxième année de biomédicale, lui et Geoffrey espèrent passer en médecine l’an prochain. Un objectif qui demande une forte discipline. « On vient souvent à plusieurs, concède William. Même si on ne travaille pas ensemble, ça nous permet de se retrouver lors des pauses ».

« Avec cette situation sanitaire on se rend compte que les bibliothèques, ce n'est n’est pas juste un endroit froid »

Derrière son hygiaphone à la sortie du sas, Chantal contrôle le passe droit des étudiants, leur sac dos en leur indiquant de valider leur heure d'arrivée sur la plateforme d’inscription. Depuis le début de la crise sanitaire le protocole a poussé la bibliothèque à restreindre son nombre de places disponibles de 700 à 365. Pour autant il n’y a pas une seconde de répis pour le personnel. « Là on est évidemment à bloc. Tous les jours les salles sont presque pleines », explique Chantal en signant d’un doigt rapide et agacé la tablette d’une factrice venue amener un livre.


Dans la rue perpendiculaire, assis sur un perron, Lucie et Yanis profitent d’une pause, Actimel dans une main, pépito dans l’autre. Le couple s’est retrouvé à la Bibliothèque Sainte Barbe ce matin, une première pour elle, une nouvelle habitude pour lui. « Avec cette situation sanitaire on se rend compte que les bibliothèques, ce n'est n’est pas juste un endroit froid », réagit le jeune homme en dernière année de master d’histoire. Pour eux, simplement voir les autres « ça fait quand même quelque chose, on se sent moins seul dans notre travail ».


Une situation compliquée par le couvre-feu

De l’autre côté du jardin du Luxembourg, rue d’Assas, le taux d’occupation de la bibliothèque de Paris II est de 10% à la mi-journée. Assise près de la baie vitrée, Gabrielle a fait de la bibliothèque son lieu de travail de prédilection. « C’est un peu mon seul échappatoire », déclare-t-elle. Si la vingtenaire apprécie de pouvoir travailler en bibliothèque, le couvre-feu lui ferait presque regretter le confinement. « Au moins après avoir travaillé toute la journée, je peux me balader une heure et respirer ».



Quelques tables plus loin, Laurine s’octroie une rapide pause dans ses révisions de procédure pénale. Pour la jeune femme préparant les concours de la magistrature, « la bibliothèque, est une bouée de sauvetage ». Même si les plages horaires sont limitées à 20h par semaine et par étudiant. Mais l’instauration du couvre-feu a rendu la situation « très très lourde ». « Je mets une énergie incroyable dans la planification », se fatigue-t-elle. Entre les horaires d’ouverture, le temps de transport, les quotas horaires et le couvre-feu: « c’est une vraie gymnastique mentale ». À l’aube d’un troisième confinement, la plupart espèrent que les bibliothèques resteront ouvertes, véritable oasis dans le désert.


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