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Les salons de coiffure «overbookés» à l’approche d'un nouveau reconfinement

Alors qu’un troisième confinement semble imminent, les Français se ruent dans les salons de coiffure pour bénéficier d'une dernière coupe. La Quatorzaine est allée à la rencontre des coiffeurs du quartier Montparnasse à Paris.

Au Studio 210, l'agenda du salon de coiffure est complet depuis trois jours. (Crédits : Studio 210).

Il est 11h30. Sur le boulevard Raspail, dans le quatorzième arrondissement de Paris, l'ambiance est plutôt calme. La plupart des commerces sont fermés. La plupart, mais pas tous. Entre l'hôtel Royal et le restaurant le Gymnase, le salon de coiffure installé au numéro 210 ne désemplit pas. Blazer noir et chevelure brune impeccable, Élodie, la patronne du Studio 210 s'occupe de la permanente d'une cliente. Avec son employée Christina, elles croulent sous les demandes de Parisiens, pressés de couper leur tignasse, avant l'annonce fatidique d'un confinement certain, mais dont la date se fait attendre.


« On est overbookés parce que les gens s'excitent », s'écrie la gérante du salon entre deux coups de sèche-cheveux. Dans les salons des environs le constat est le même : « C’est complet aujourd’hui, désolé, rétorque Bruno, coiffeur depuis 20 ans à un client au téléphone. Demain peut-être si on est pas confinés d’ici là ? ». A quelques dizaines de mètres de là, Tristan sort d’un autre salon tout sourire et impeccablement coiffé. « J’ai dû faire trois coiffeurs avant d’être accepté quelque part. Tout était complet. Il y avait vraiment urgence, surtout quand on sait que bientôt tout sera fermé ».


Un rythme en dents de scie


Le mois de janvier a été très calme, mais depuis mardi le téléphone ne s'arrête plus. « En temps normal on prend des personnes sans rendez-vous, mais depuis trois jours l'agenda est complet, c’est parfaitement impossible », précise Élodie. Ce que Catherine, en quête d’un coiffeur dans le quartier, n’avait pas prévu. « Je n’ai pas pensé appeler, je me retrouve sans aucune place nulle part, regrette la commerçante de 42 ans. Je vais aller voir autre part, il y en a bien un dans la ville qui va m’accepter ». Une trentaine de clients par jour défilent dans les différents salons du quartier Montparnasse. Un rythme d'avant Covid, mais qui ne permet pas de rattraper le manque d'activité de l'année 2020. « Moi j'en ai ras-le-bol et de manière générale on commence à baisser les bras. Il y a des pics où on travaille beaucoup et ensuite c'est le calme plat. C'est assez démoralisant de vivre ce genre de rythme ». « Ça marche par vagues », résume Mélanie, coiffeuse chez Franck Provost.


La crise sanitaire, en plus d'avoir mené à la fermeture des commerces, a imposé une nouvelle organisation du travail qui nuit à l'activité des salons de coiffure. « Les gens qui sont en télétravail n'ont pas besoin d'aller tous les mois au salon de coiffure. Et puis il y a les hommes qui ont pris l'habitude de se faire couper les cheveux par madame pendant le confinement ». « On a aussi beaucoup de femmes qui ont appris à vivre avec leurs cheveux blancs et qui ne font plus de couleurs », plaisante Christina en balayant les cheveux tombés sur le sol.


Le reconfinement : pas une mauvaise idée finalement


La cliente qui avait rendez-vous à 11h30 quitte le salon de Mélanie. Elle habite le quartier et vient tout le temps se faire coiffer au Studio 210. « A bientôt Sylvie », lui glisse chaleureusement Élodie, avant de refermer la porte. Une fois la cliente partie, un air morose envahit son visage. « En fin de compte c'est peut-être mieux si on est reconfinés. Dès qu'on se remet à travailler on perd les aides et on n'arrive pas à payer nos charges fixes. Pour le mois de janvier, je ne rentre pas du tout dans mes frais ». En effet, sans ses restaurants, bars ou brasseries, le quartier de Montparnasse est bien vide et cela se ressent sur l’affluence des salons de coiffure. Un constat amer pour Elodie qui envisage de mettre fin à une aventure débutée quatre ans auparavant. « Franchement aujourd'hui si je peux vendre le salon, je serai la plus heureuse du monde, les gens n’imaginent pas comment c’est difficile d’être patron ».


La fin de l'année avait déjà envoyé des signaux inquiétants. Pour la première fois en 17 ans de carrière, Élodie a fermé son salon le 31 décembre. « J'avais un seul client qui voulait prendre rendez-vous, donc je n'ai pas ouvert ça n'avait aucun intérêt. Déjà le 24 décembre, avec les fêtes en comité réduit je n'avais pas eu beaucoup de monde au salon ». Résultat : une perte de 40 à 60% de son chiffre d'affaires pour l'année 2020. Difficile d’être optimiste cette année. Même si un schéma hybride de confinement est envisagé, il est peu probable que cette option permette aux habitants du XIVe arrondissement de s’installer dans les fauteuils du Studio 210.

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