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Recyc’Livre ou l’essor du livre de seconde main par temps de pandémie

L’acteur historique de la vente par correspondance de livres d’occasion a vu ses ventes augmenter sur l’année 2020, alors que les librairies ont été mises à l’épreuve par la crise sanitaire.

L’entreprise Recyc’Livres a vu son chiffre d’affaires grimper à 9 millions d’euros en 2020 (Crédits : Recyc'livre).

2020 aura été une année en dents de scie pour le secteur du livre : on se souvient encore des librairies aux rideaux fermés pendant le premier confinement, et des queues dantesques qui s’y étaient formées lors de l’annonce du second. Certains ont mieux résisté à la tempête que d’autres, c’est notamment le cas des entreprises de vente de livres par correspondance. Pour Recyc’Livre, un des acteurs historiques de ce marché, 2020 a plutôt été l’année de tous les records.


Entreprise sociale et solidaire


Si les librairies ont enregistré une baisse de leur activité de 3% sur l’année, c’est parce que les chutes (-70 à -85% en novembre) ont été compensées par des bonds (+ 32% en juin, après le premier confinement, puis + 35% en décembre après le second). Malgré les demandes des libraires, les livres n’ont pas été considérés comme des biens de première nécessité et ne pouvaient donc être achetés en magasin. C’est donc la vente en ligne qui a tiré profit de la pandémie, bondissant de 30% au 3ème trimestre. L’entreprise Recyc’Livre a, quant à elle, vu son chiffre d’affaires grimper de 8 millions d’euros en 2019 à 9 millions d’euros en 2020 - une progression record, nous raconte le fondateur de l'entreprise David Lorrain.


La raison du succès tient peut être au profil de David Lorrain : entrepreneur dans le numérique dès les débuts d’internet en 1995, il crée en 2008 Recyc’Livre avec l’ambition de montrer qu’on peut « gagner de l’argent tout en étant humain et en protégeant la planète », nous assure-t-il. Comme tous les acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS), Recyc’Livre est tenu de mettre en avant trois principes : l’écologie (la collecte des livres à domicile se fait en véhicule électrique), la solidarité (10% du prix de vente net est reversé à des associations, ce qui a permis de collecter un million d’euros en dix ans) et le lien social (une partie de l’entreprise est sous-traitée à des activités d’insertion).


« Ce n’est pas rien, de se séparer d’un livre ! »


Au-delà de la trentaine d’employés mobilisés pour le fonctionnement de Recyc’Livre, la logistique - il faut recevoir, trier et expédier des livres répartis dans un entrepôt de 6 000m² -, est assurée par un partenaire, ARES, une entreprise d’insertion qui favorise l’emploi de personnes en situation de handicap. Pour permettre à chacun de trouver sa place dans l’entrepôt, le logiciel de gestion qui a été développé prend en compte les spécificités des handicaps - avec la possibilité d’afficher des caractères plus gros pour les malvoyants, ou encore d’émettre des vibrations pour transmettre des informations simples. Recyc’Livre est aussi une entreprise libérée, c’est-à-dire que « son but est que chacun ait des responsabilités, une vision claire du but que nous poursuivons tous ensemble et des moyens mis en place pour y parvenir », continue David Lorrain.

Dans un contexte de défiance croissante envers le géant américain de la vente par correspondance, Amazon, les trois piliers de l’ESS sont autant d’arguments en faveur de Recyc’Livre. « On a toutefois perdu une partie du lien avec nos clients depuis le confinement, déplore le créateur de l'entreprise. Avant, les gens nous donnaient les livres en main propres et pouvaient discuter avec les collecteurs : ce n’est pas rien, de se séparer d’un livre ! Aujourd’hui, on leur demande de le déposer sur le palier pour des raisons sanitaires ». En évoquant les difficultés qu’ont rencontré les libraires cette année, lui préfère pointer la grande distribution, qui « tue » la librairie locale. Mais la vente en ligne ne remplacera jamais le contact qu’un acheteur peut établir avec un libraire, reconnaît David Lorrain, qui estime simplement ne pas faire le même métier. « Un libraire, son travail c’est de connaître ses livres et son client ; nous, on ne fait pas ça ». Avant d’ajouter, songeur : « Pour l’instant. »

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